Revista de filosofía

Smartphones : la mobilité du corps et du réseau

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Autores:

Lilyana Valentinova Petrova

Ghislaine Chabert

Jacques Ibáñez Bueno

 

 

Abstrait

À l’heure où les outils numériques prolifèrent, une grande partie de nos concepts et connaissances évoluent, eux aussi, au rythme de ces changements. Ainsi, nous saisissons cette opportunité et proposons une réflexion théorique pour accompagner l’objet le plus convoité de notre époque : le téléphone mobile (smartphone). D’après nous, les notions de corps et de réseau forment une des synthèses possibles de la mobilité contemporaine et c’est autour de cette substantifique moelle que nous déroulerons notre réflexion. Nous définirons ce que c’est qu’un corps-mobile et un réseau-mobile, deux concepts que nous proposons afin de contribuer aux réflexions sur la technologie numérique du point de vue de la mobilité. Aussi, nous intégrerons l’image à nos réflexions, car le petit écran mobile de nos outils numériques (smartphones, tablettes, iwatchs) avance à pas surs dans la direction de ce même processus de visualisation du mouvement et de mobilisation du visible. Observons-le par ses deux éléments constitutifs : le corps-mobile et le réseau mobile.

Mots-clés: communication mobile, géolocalisation, mobile-body, mobile-network

 

 

Abstract

At a time when digital tools are proliferating, much of our concepts and knowledge are changing as well. Thus, we seize this opportunity and propose a theoretical reflection to accompany one of the most curious artefacts of our time: the smartphone. According to us, the notions of body and network form one of the possible syntheses of contemporary mobility and it is around this two concepts that we will unfold our reflection. We will define what is a mobile-body and a mobilenetwork, two notions that we propose in order to contribute to the reflections on digital technology from the point of view of mobility. Also, we will integrate a reflection on visual aspect of the small mobile screen of our digital tools (smartphones, tablets, iwatchs). This ajustment makes us advance in the direction of understanding the process of visualization of the movement and mobilization of the visible. Let us observe it by its two constituent elements: the mobile-body and the mobilenetwork. Key Words : mobile communication, geolocation, mobile-body, mobile-network

Key Words : mobile communication, geolocation, mobile-body, mobile-network

 

 

Resumen

En este periodo de cambios digitales y sociales muchos de nuestros conceptos y conocimientos también están cambiando. Aprovechamos esta oportunidad y proponemos una reflexión teórica para seguir el objeto más deseado de nuestro tiempo: el teléfono móvil (smartphone). Según nosotros, los conceptos de cuerpo y red forman una de las posibles síntesis de la movilidad contemporánea y son la base de nuestra reflexión. Definiremos qué es un cuerpo móvil y una red móvil, dos conceptos que proponemos para contribuir a las reflexiones sobre la tecnología digital desde el punto de vista de la movilidad. Además, integraremos la cuestión de la imagen a nuestras reflexiones, ya que la pequeña pantalla móvil de nuestras herramientas digitales (smartphones, tabletas, iwatchs) avanza con este mismo proceso de visualización del movimiento y movilización del visible. Veámoslo por sus dos elementos constitutivos: el cuerpo y la red móviles.

Palabras clave: comunicación móvil, geolocalización, cuerpo móvil, red móvil

 

À l’heure où les outils numériques prolifèrent, une grande partie de nos concepts et connaissances évoluent, aussi, au rythme de ces changements de paradigmes et de l’apparition de réflexions sur les humanités numériques. Tandis que les évolutions des objets techniques du siècle dernier étaient au cœur de la pensée du philosophe Gilbert Simondon,[1] ou que l’impact de ces mêmes techniques sur la notion de la représentation avait animé les réflexions de Walter Benjamin,[2] notre époque n’est pas non plus démunie de sujets de contemplation et d’études similaires. De l’impression tridimensionnelle (3D) aux mondes persistants, des réseaux sociaux à la crypto-monnaie, les techniques contemporaines ont toutes le potentiel d’éveiller les curieux et de réveiller les mythes et les angoisses temporairement endormis.

Gilbert Simondon

Gilbert Simondon

Ainsi, nous saisissons cette opportunité de recherche[3] et proposons une réflexion théorique pour accompagner l’objet parmi les plus convoités de notre époque : le téléphone mobile (smartphone). Réduit à l’essentiel, le téléphone mobile est un objet physique en lien avec d’autres objets, qui permet de connecter des entités de nature différente, du vivant comme de l’inanimé. Ainsi, il dispose d’un corps qui n’est ni uniquement matériel, physique, ni seulement numérique et visuel, mais qui effectue la fusion des deux. Davantage, mises en lien les uns avec les autres, les corps de la technologie mobile forment des réseaux singuliers, capables d’intégrer en un tout les hétérogénéités de l’outil. Ainsi, les notions de corps et de réseau forment une des synthèses possibles de la mobilité contemporaine autour de laquelle se déroulera notre réflexion. Nous définirons respectivement ce que c’est qu’un corps-mobile et un réseau-mobile : deux concepts que nous proposons pour contribuer aux réflexions critiques sur la technologie numérique du point de vue de la mobilité.

Getty Images

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La mobilité est déplacement, la mobilité est mémoire, la mobilité est perception. Intrinsèquement hétéroclite, la mobilité conditionne une manière de voir le monde. Dépliée sur des surfaces différentes (géographiques, numériques, visuelles), elle offre une vision des espaces, des sensations, des matières, des temps et des présences autres. À l’instar de la peinture, elle est « un art de l’espace »[4] qui utilise perspectives, éloignements et plans composés pour témoigner d’une force motrice. Or, « la toile immobile pourrait suggérer un changement de lieu comme la trace de l’étoile filante sur ma rétine me suggère une transition, un mouvoir qu’elle ne contient pas ».[5] Mais si la toile (image) « s’est donné un mouvement sans déplacement, par vibration ou rayonnement »,[6] le mouvement (trace) s’est donné une image par transmission et réception. Depuis la photographie, le cinéma et la télévision, c’est par l’image que nous rendons compte du mouvement et de son passage. Souvent, par l’image, les différentes technologies manient les éléments constitutifs de la mobilité elle-même (l’espace, le temps, le corps). De même, représentés, multipliés, modifiés, les corps utilisent l’image pour pouvoir naviguer dans un univers de plus en plus hétérogène. Quant aux réseaux, ils dirigent leurs navigations. Ainsi, nous intégrerons aussi l’image à nos réflexions, car le petit écran mobile de nos outils numériques (smartphones, tablettes, iwatchs) avance à pas sûrs dans la direction de ce même processus de visualisation du mouvement et de mobilisation du visible. Observons-le par ses deux éléments constitutifs : le corps-mobile et le réseau mobile.

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Corps-Mobile

Buchstaben sind Nomaden – ihr Tempel ist das Zelt

Peter Daniel[7]

Avant toute chose, le téléphone mobile est un corps. C’est le corps de l’outil, c’est le corps de l’image, c’est le corps de l’utilisateur et c’est le corps de l’usage. Il est hybride, il est en soi tous ces corps ensemble. À écouter la philosophie, « les invariants bioculturels forment le soi corporel depuis la construction du corps jusqu’à sa subjectivation, en passant par l’interaction et l’incorporation ».[8] Il y a ‘dans’ le corps les substances actives (les organes, les muscles, les composants numériques, les logiciels), puis les strates de mémoire, les rides du temps, les gestes des coutumes. La notion de corps même est toujours celle d’un corps communicant,[9] car c’est bien de pratiques corporelles dont il s’agit lorsque nous nous dressons dans le monde, avec ou sans téléphone à la main. Certes, « nous ne sommes pas devant notre corps, nous sommes dans notre corps ou plutôt nous sommes notre corps »,[10] y compris ses fragments numériques. Ainsi, le proverbe « dis-moi qui sont tes amis et je te dirai qui tu es » deviendrait « dis-moi qui sont tes ‘applis’ et je te dirai qui tu es » puisqu’ensemble avec la chair, le corps de l’outil mobile compose le schéma corporel dont nous sommes les transporteurs. Littéralement, métaphoriquement et par incorporation, ce qui fait corps dans les pratiques numériques en situation de mobilité échappe dans un premier temps à toute catégorie, à tout cadre et à tout privilège et prend la forme d’une caractéristique plutôt que d’une substance.

Le corps, loin d’être une catégorie obsolète, est le lieu par excellence de prise de conscience de l’écart à soi et, par essence, celui de l’origine de tout processus de médiation et de réparation. C’est parce qu’il est près du corps, adapté à la main, à la préhension, au toucher, que le mobile devient l’enjeu d’un travail de recomposition de soi. Le geste de prendre son mobile est assimilable à une action autonome, à une reprise en main de son corps et, simultanément, du temps.[1]

Bien que souvent démontrée (Couchot 2007, Parfait 2001) la notion de corporéité au sujet de l’image numérique reste fragile. Mais cela n’est-il pas inhérent notamment à la notion de corps dans son ensemble, matière, image et mutations incluses? Le corps, qui influe sur les images extérieures en leur restituant le mouvement, « paraît choisir dans une certaine mesure, la manière de rendre ce qu’il reçoit », d’interagir dans la temporalité de son dévoilement.[11] Il est par conséquent instructif pour l’ensemble du décor environnant (y compris numérique), qui lui-même se déploie dans une temporalité.[12] La deuxième partie du néologisme corps-mobile – le mobile – vient souligner précisément ce caractère changeant des corps. Ainsi, dans une contradiction fertile, le corps-mobile constitue le noyau ferme de la mobilité contemporaine. Entre altération et subsistance, il désigne ce qui ‘demeure’ nonobstant les changements de supports, de contenus, d’histoires, de territoires, du temps lui même.Getty Images

Le corps-mobile forme une transversalité du corps, capable de se penser comme matière, comme forme et comme information à l’unisson. Similairement, la pensée Heideggerienne nous a appris que le temps est insignifiant en soi, puisqu’il existe uniquement dans la mesure où il est temporel, c’est-à-dire qu’il propose un système référentiel par rapport auquel se situerait l’expérience du temps qui sera dès lors nécessairement singulière. Le Dasein « compte avec le temps et s’oriente sur lui ».[13] Ainsi, la singularité corporelle de l’outil numérique mobile est une singularité qui trouve des appuis dans le changement et se situe dans un système référentiel mobile tel qu’établi par le mécanisme des flux (physiques et numériques). « Le corps a une identité mobile, car sa matière n’est pas achevée ni achevable. Son identification précipite la matière corporelle hors d’elle-même dans une construction interactive de ses formes et de ses fonctions par une détermination externe […] ».[14] À titre d’exemple, lors d’une requête géolocalisée, le moi corporel ‘saute’ de la rue ‘dans’ l’écran, ‘sur’ l’image, à travers les multiples informations et projections, en choisit une et revient au carrefour initial. Ce parcours nous est inimaginable sans l’existence d’un corps-mobile qui est conservé dans la durée. En réfléchissant aux questions du mouvement, nous arrivons indubitablement à considérer qu’« [o]n ne peut pas entrer deux fois dans les mêmes fleuves »,[15] car « [p]our ceux qui entrent dans les mêmes fleuves affluent d’autres et d’autres eaux ; et certes, les âmes s’exhalent de l’humidité ».[16] Contrairement à une photographie qui est censée capturer un instant de réel, le support d’enregistrement numérique mobile est lui même changeant. L’apodicticité des paroles héraclitéennes accable toute expérience de l’existant de la mobilité connectée ; le corps-mobile est ce qui reste avec le pied pendant que ce même ‘pied’ se fait emmener par les flux des eaux.

Ainsi défini, le corps-mobile est la forme ubiquitaire que peut prendre l’expérience de la mobilité connectée. Situé au sein d’un système ‘en perpétuel mouvement’, il regroupe des ‘fragments’ divers de la mobilité (le corps physique, l’identité, le territoire, la communauté, la conscience d’un univers partagé) et il incarne ses transfigurations, comme la nature sauvegarde la traduction des éléments.[17]

À partir du mot comme phénomène physique, comme ensemble de vibrations dans l’air, on ne pourrait décrire dans le cerveau aucun phénomène physiologique capable de servir de substrat à la signification du mot, puisque, nous l’avons vu, dans l’audition et aussi dans l’élocution, le mot comme ensemble d’excitations motrices ou afférentes présuppose le mot comme structure mélodique et, celui-ci, la phrase comme unité de signification.[18]

Le corps-mobile est le mot qui définit ce ‘plasma’ informe, entre corporalité, corporéité, temporalité et formalité, qui est au final plus proche des caractéristiques d’une qualité que de celles d’une entité, puisqu’il est la qualité d’une situation – être corps et être mobile. Par ailleurs, ici aussi, comme pour tout usage du mot mobile, l’accent est mis sur le caractère spécial qui s’impose à la fois de manière extérieure et intérieure au communicant (qu’il soit homme, animal, objet ou machine), et ne saurait se confondre avec des phénomènes proprement organiques, psychiques ou informatiques, mais qui constitue une espèce ‘nouvelle’ à laquelle est réservée la qualification de mobile (voir introduction). Les œuvres d’Alexander Calder [Fig. 1] sont la manifestation de ce type d’objets dont l’essence même est livrée par le mouvement qui fait partie intégrante de leur corps. Sous la plume de Sartre, un mobile est « une petite fête locale, un objet défini par son mouvement et qui n’existe pas en dehors de lui […] ».[19] Impossible d’imaginer ses ‘mobiles‘ en ‘stabilité’ autrement que dans le mouvement, puisque la forme qu’ils proposent est une forme de déplacement, d’interaction entre leur composant et l’environnement (les courants d’air, le passage des spectateurs, l’inertie, puis « c’est l’heure, le soleil, la chaleur, le vent qui décideront de chaque danse particulière »[20]). Toute partie a un sens dans un tout dont la cohérence émerge de manière combinatoire à la fois aléatoire (puisque la sculpture même a un nombre d’éléments limité) et hasardeuse (puisque nul ne sait les limites de cet objet s’il devait se faire emporter par le vent). Toujours d’après Sartre, « Calder ne suggère rien : il attrape de vrais mouvements vivants et les façonne. Ses mobiles ne signifient rien, ne renvoient à rien qu’à eux-mêmes : ils sont, voilà tout ; ce sont des absolus »,[21] puis il les compare à la mer, dans ses cycles de marées, il ne s’agit pas d’y jeter un coup d’œil en passant, « il faut vivre dans son commerce et se fasciner sur lui ».[22]

Ainsi, ramenées au concept fédérateur de corps-mobile, c’est-à-dire d’entité formelle susceptible de se mouvoir ou d’être mue, les hétérogénéités s’offrent à l’observation, à la manipulation, à l’étude empirique et à la modélisation et supposément facilitent la compréhension du processus général. Autrement dit, dans le cadre de l’étude des pratiques numériques en situation de mobilité, nous parlerons de corps-mobile pour désigner les entités (organismes, objets, signes, dispositifs) qui maintiennent une certaine consistance formelle, reconnaissable à travers les transformations inhérentes à leur structure. Les applications, les hashtags, les symboles, les images, les mèmes.[23] Les profils, les logos, et tant d’autres entités changeantes, mouvantes sont des exemples des formes que peut prendre le corps-mobile par ses transformations entre texte, image et corps. Les lettres aussi incarnent cette idée de mouvement constant autour des combinaisons infinies de la parole. À une autre échelle, le corps humain peut lui aussi être observé en tant que corps-mobile dans le sens où il préserve sa singularité à travers l’évolution du temps. En réalité, « on reconnaît principalement une chose à ce signe qu’elle ne peut pas être modifiée par un simple décret de la volonté »[24].** Ainsi, le corps-mobile, peut être reconnu à ce signe qu’il est une qualité inébranlable, intrinsèque aux fragments du réel, et qu’il ne disparaît pas par la simple transition de situation de mobilité en situation d’immobilité. La condition même du corps-mobile se retrouve aussi bien dans une statue que dans le corps de l’athlète que dans les règles de sa performance sportive, elle est au-delà du mouvement dans son instantanéité, appartient pareillement à l’épaisseur de la durée.[25] En sorte, elle est toujours là, en couvant à l’intérieur des objets, des corps, des usages, des collectifs de même que la pratique est toujours nichée dans l’outil, prête à s’exalter à la demande. Le collectif Canadien MAM (Mouvement Art Mobile)[26] et leur exposition Mains libres sont une belle incarnation de ce qu’est une équipe intéressée par la dimension mobile des corps.

Enfin, c’est un terme que nous pouvons qualifier de « nomade »,[27] il est plus proche de l’adjectif que du nom, tout en contenant les deux. Il se déploie parmi les objets étudiés et augmente sémantiquement leurs capacités descriptives et explicatives en soulignant leur dimension mobile. Ainsi, le corps-mobile est un terme qui reconnaît dans la totalité du paysage lexical (sujet, verbes, adjectifs, substantifs), une qualité intrinsèque, éclairant sur l’essence de ce à quoi il se réfère. Que nous l’appliquions aux mots, aux images, aux gestes, aux déplacements ou aux messages (textuels, iconiques, médiatiques) celui-ci se comporte comme un nomade, il reconnaît les points de passages et les puits d’eau. Il vise à se projeter dans des ‘corps’ différents, de même que « [l]’originalité de la conception touarègue est de se projeter dans un corps non pas statique, mais toujours en mouvement ».[28] Sur le modèle atomique, le corps-mobile dépasse la forme d’un objet formellement déterminé pour prendre les formes d’un groupement, d’un ensemble de fragments moléculaires, d’un système qui subsume des entités ad hoc. Durant le déplacement, le point représenté sur l’écran du GPS est un corps-mobile qui adapte les informations en temps réel, recalcule les voies et les positions, s’attache à un système référentiel lui-même changeant. Ce système (de relations potentielles) est quant à lui le réseau emprunté par tout corps-mobile : un réseau-mobile.

Mains libres, photographies mobiles

Mains libres, photographies mobiles

 

Réseau-Mobile

RÉSEAU, s. m. (Ouv. de fil ou de soierie.) sorte de tissu de fil ou de soie
fait au tour, dont quelques femmes se servent pour mettre à des coëffes, à des
tabliers, & à autres choses. Un réseau est proprement un ouvrage de fil simple,
de fil d’or, d’argent, ou de soie, tissu de manière qu’il y a des mailles & des ouvertures;
il y a toutes sortes d’ouvrages de réseaux: la plûpart des coëffures de femmes, sont faites
de tissus à jour & à claires voies, qui ne sont autre chose que des espèces de réseaux,
dont les modes changent perpétuellement.

Diderot et Alembert[29]

 

Matière de circuit, déterminant une forme mouvante et évolutive, le corps-mobile ne peut être complètement défini que dans la mesure où il est en lien avec d’autres corps-mobiles. Ainsi, mis l’un à côté de/près de/sur/dans l’autre, les corps-mobiles constituent un réseau de rencontres par lequel ils se heurtent et se forgent. De la même façon qu’un corps-mobile n’existe pas en dehors du mouvement, il n’existe pas non plus en dehors du réseau qui assure sa dimension communicative (de mise en commun). Comment imaginer le téléphone mobile en dehors des réseaux de télécommunication autrement qu’en tant que simple appareil photographique ou machine à écrire au mieux couplée à un dictaphone. C’est le lien qui affirme la communication et la fonction du réseau est de mettre en lien, d’acheminer un message (image, localisation), de clore un infini.[30] Le téléphone mobile est corrélé au réseau de télécommunications ; c’est là une affirmation évidente. Cependant, la même chose peut être dite pour l’ordinateur, pour la télévision, pour la radio sans pour autant faire ressortir la particularité d’un outil mobile de type smartphone. Ainsi, l’introduction du terme réseau-mobile s’impose afin de pouvoir examiner le changement que subit le réseau de par la dimension mobile.

Getty Images

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Au niveau encyclopédique le réseau prend une forme plurielle ; il s’applique au même titre à la pratique de la pêche (filet), de la couture (tissu, dentelle, ensemble de fils et de bandes), au domaine biologique (des plantes telles que la menthe, les framboises et les fraises se propagent en réseau), ainsi qu’à celui de la criminalité (réseaux clandestins), de l’activisme (réseaux de résistance) ou pour parler de diverses organisations (réseau de chercheurs, de lecture, de notaires).[31] C’est en somme un terme polysémique, qui a été habilement manié par des penseurs du réseau depuis le siècle dernier. Certes, la philosophie des réseaux a déjà apporté des points de vue différents sur la notion de réseau : un regard historique et politique du point de vue des sciences de l’information et de la communication (Pierre Musso, 2003),[32] un regard ‘rhizomique‘ (Deleuze et Guattari, 1980),[33] un regard territorial (Anne Cauquelin, 2002),[34] un regard sociologique (Bruno Latour, 1996).[35] Ces différentes analyses démontrent fort bien la dimension ontologique des réseaux d’aujourd’hui, leur forme, leur importance de manière concrète et dans l’absout ; il s’agit d’y voir ‘une porte battante’ étant à la fois un point d’entrée et de sortie, reliée à d’autres points.[36] Au premier regard, il semble que cette définition soit identique qu’il s’agisse des réseaux de transport (ferroviaire, autoroutier, aérien), des réseaux énergétiques (eau, gaz, électricité) ou des réseaux de télécommunications (téléphonie, télévision, Internet), car ils correspondent à un ensemble de nœuds interconnectés qui permettent les rapports dans un processus communicationnel. Idem, au sein des réseaux des télécommunications les idées de l’interconnexion, de l’horizontalité et de l’ouverture (créatrice?) restent prédominantes, et ceci à juste titre. Or, il semble tout de même pertinent de s’interroger sur ce que la mobilité (commobilité), et conséquemment la géolocalisation, apporte au concept du réseau puisque « les réseaux numériques fabriquent [eux-mêmes] une forme de localisation »[37] et que ces différentes localisations pourraient rentrer en interaction/contradiction l’une avec l’autre. Consulter l’Internet depuis un cybercafé en Tunisie (1) où lors d’un trajet en voiture (2) sont en effet des pratiques incommensurables malgré le fait que leur contenu soit similaire (dans les deux cas il s’agit d’avoir un accès à l’information fournie par l’Internet). Dans le cas (1) l’utilisateur doit se rendre à un lieu donné afin d’exercer sa pratique, tandis que dans le cas (2) le lieu d’accès est son point de présence, sa pratique n’a plus que le lieu de l’objet technique. Tout se passe comme si pour (1) il fallait aller ‘au puits’ pour puiser de l’eau alors que (2) transporte sa ‘gourde’ avec soi. S’agit-il du même ‘réseau’ d’après ses différents rapports à la localisation ? Une réplique du film La Cabine énonce que « les générations futures ne pourront jamais vraiment comprendre qu’une cabine téléphonique était un lieu où les cœurs pouvaient trembler ou se briser ».[38] La carte de la disposition (et de la disparition en 2017) des cabines téléphoniques appartient plutôt à l’histoire qu’au futur, malgré certains projets qui aspirent à leur réinvention.[39] Google, par exemple, désire équiper le monde de sa version des cabines téléphoniques – les bornes Link –, avec lesquelles, à la différence des designs et des usages pensés par leurs prédécesseurs, il suffit de s’inscrire une seule fois au service pour que le téléphone de l’utilisateur se connecte automatiquement au réseau à chaque fois qu’il sera à portée et que le wifi sera activé.[40] Contrairement au réseau de téléphonie fixe, la mobilité n’apporte pas seulement un réseau (au sens d’une inter/connexion non hiérarchique), mais un réseau-mobile, (au sens de transmutable[41]), et celui-ci semble être plutôt mobile que réseautique. Avec la technique de type wifi, 2G, 3G ou 4G, le réseau-mobile n’est-il pas un réseau distinct ? En plus d’être un sous-groupe du réseau, le réseau-mobile n’est-il pas une entité à part entière pour le moins en termes d’usages ?

Tout d’abord, le réseau-mobile entretient des relations ambiguës avec la territorialité. Comme des spider-men de la ville contemporaine, les utilisateurs s’y ‘accrochent’ au fur et à mesure de leurs déplacements. Le projet Immaterials: Light painting WiFi[42] [Fig. 2] permet de visualiser les paysages invisibles des réseaux-mobiles qui, malgré leur invisibilité à l’œil nu, sont tout de même perçus comme omniprésents par les utilisateurs ‘connectés’ (sauf quand ils sont totalement absents dans les zones ‘sans couverture’, les zones blanches). « Traiter des ”territoires numériques” selon la logique réticulaire des transports et des ”réseaux à agencement partiellement topographique”, c’est se condamner à demeurer dans la ”tuyauterie” des réseaux, c’est-à-dire dans des visions de plombier (qui plombent l’analyse) ».[43] Il faut, d’après Pierre Musso, au contraire comprendre et développer la grammaire et les logiques « du seul territoire réellement ”numérique” : le cyberespace ».[44] Or, à l’ère du réseau-mobile cette ambition n’est plus suffisante ; aussi autonome soit-il, le cyberespace (des années 1990 tel que revendiqué par John Perry Barlow[45]) ne cesse de renégocier avec une multitude d’autres espaces (géographique, écranique, cartographique, d’images de réalité virtuelle, de réalité augmentée, de réalité alternée) estompant les limites entre eux et faisant de leur interaction sa place attitrée. Il est bien connu, Internet est, « depuis ces débuts lointains, une entité insaisissable, à la fois carte et territoire d’un espace numérique où tout circule et tout se branche ».[46] À présent, en plus de matériaux numériques, le réseau des réseaux (Internet) inclut dans ses assemblages des ‘pierres’ et des ‘eaux’ venant de la terre même et thésaurise sur leur malléabilité. Contrairement à son prédécesseur, le réseau-mobile ne jouit pas d’une seule forme de territorialité (soit physique, soit cyber), mais à l’inverse il ‘sautille’ entre les territoires (les corps-mobiles) qui lui servent de support.

Ainsi, dans un second temps, après s’être dispersé sur une multitude de supports hétérogènes, le réseau-mobile s’empare du mouvement dans son ensemble, c’est-à-dire qu’il incarne ce que Bergson nomme le « mouvement des mouvements ».

On avait beau s’abstenir de toute représentation imagée de l’atome, du corpuscule, de l’élément ultime, quel qu’il fût : c’était pourtant une chose servant de support à des mouvements et à des changements, et par conséquent en elle-même ne se mouvant pas. Tôt ou tard, pensions-nous, il faudrait renoncer à l’idée de support. Nous en dîmes un mot dans notre premier livre : c’est à des ”mouvements de mouvements” que nous aboutissons, sans pouvoir d’ailleurs préciser davantage notre pensée[47].

En effet, cette chimère bergsonienne semble prendre corps avec le réseau-mobile, qui matérialise le mouvement en tant que support (de la mémoire), moteur (de l’inter/action) et médiateur (de la connexion entre les différents éléments). Dans Essai sur les données immédiates de la conscience, Bergson décrit le mouvement comme une affaire de conscience, car « avant, pendant et après le mouvement, rien ne change, rien n’est changé dans l’ensemble ».[48] Il poursuit « [l]e mouvement dont on parle ici n’est donc pas un mouvement qui se produit, mais un mouvement que l’on pense ; c’est un rapport entre les rapports ».[49] Similairement, le réseau-mobile est un réseau entre les réseaux ; il connecte le ferroviaire avec le social, l’énergétique avec le numérique, le physique avec l’économique, le plastique avec l’immatériel. Bien qu’il propose des possibilités d’autant plus nombreuses que les réseaux traditionnels,[50] le réseau-mobile suppose un rapport différent. Il unit non seulement malgré l’hétérogénéité (comme dans le cas de la pensée cybernétique), mais grâce à cette dernière. Par définition, tout réseau repose sur un amont incalculable, que nul ne fabrique de toutes pièces et dans lequel on ne peut qu’entrer.[51] « L’unité, c’est le réseau »,[52] mais une unité qui est nécessairement multiple, puisque dans le réseau-mobile il est impossible de penser la carte sans le territoire, de même que dans le Gastalt Theory les formes se précisent dans leur rencontre.

Tandis que le corps-mobile est un « nomade » qui transite de corps en corps, de mot en mot, d’objet en objet, de chose en chose, d’image en image et prodigue une signification à chaque passage, le réseau-mobile est une structure qui permet ces traversées. À l’inverse du système hydraulique qui conduit l’eau, les tuyaux numériques conduisent l’information par delà les supports dans un voyage homérique pendant lequel les obstacles sur la route (traductions, conversions, partages) constituent un minerai précieux. Le principe de l’itinérance téléphonique (roaming) révèle les contradictions entre des territoires de réseaux dissemblables, mais interdépendants. La difficulté vient de ce que lors de ces passages (du téléphone à la borne, à l’image, au corps, au téléphone, à la carte), il est malaisé de saisir les limites de cette entité relationnelle qu’est le réseau-mobile ; où commence-t-il, où s’arrête-t-il ? Pouvons-nous délimiter les pâturages des nomades et donner lieu au mouvement sans quadriller ni limiter l’élan de ses flâneries (invisibles)? Cela paraît invraisemblable puisque, à l’image de la culture, le réseau repose sur la contiguïté des unités multiples dont la rencontre construit l’unité.[53] Cette affiche, fait-elle partie du réseau avec son QR code[54] dans l’angle droit ? Cet appartement fait-il partie du réseau Airbnb[55] ? Et surtout, y a-t-il du ‘réseau’, ici ? Les questions du quotidien révèlent l’ambiguïté suscitée par le réseau-mobile, dissimulé dans un monde essentiellement connecté et interprétable. Par ailleurs, quand le sociologue Manuel Castells publie L’ère de l’information, La société en réseau (1998) puis, à environ dix années d’écart, Communication mobile et société : une perspective globale (2006), il laisse paraître le glissement du réseau vers la mobilité. Une mobilité qui est dorénavant structurante, organisatrice et pour laquelle le système réseautique sera un appui important, mais non exclusif. Or, Castells parle d’une société de réseau-mobile tout simplement pour tracer le portrait de l’amélioration de la structure sociale en réseau par des nouvelles technologies de communication sans fil.[56] Une ‘amélioration’ qui depuis a vu apparaître l’iPhone, porteur du changement autour de la mobilité et a emmené le réseau-mobile non au titre de l’évolution, mais à celui de la ‘révolution’ tel que l’annoncent certains chercheurs.[57]

Finalement, le réseau est un spécimen presque grossier en comparaison au réseau-mobile qui quant à lui joue des divergences, mobilise les décalages et stimule les séparations. L’observation (et le pilotage) d’un hélicoptère[58] (drone) en plein vol, par exemple, ne mobilise pas seulement un réseau aérien, mais nécessite le calcul de la position du regardeur (pilote), de son environnement, de son outil (téléphone, hélicoptère ou les deux), de sa vision et de son ouïe (souvent en décalage suivant la vitesse), de la destination et des capacités de la machine, sans oublier des conditions météorologiques. Tous ces éléments (corps-mobiles), dans la mesure où ils sont connectés et interdépendants, constituent un réseau-mobile dont la contextualisation communicationnelle arrive à son paroxysme attestant la nécessité d’un regard sur la mobilité connectée pour pouvoir appréhender le paysage contemporain.

Pour trouver les significations des choses, la conception dans laquelle nous nous situons, considère donc que l’esprit de l’homme procède toujours par ”contextualisation”. Dans notre conception, répétons-le, le sens naît toujours d’une confrontation d’un phénomène remarqué à des éléments dits ”contextuels” dans lesquels il ”ne peut pas ne pas prendre sa place”. […] Ainsi, donc, un phénomène, pris tout seul, en dehors de tout contexte, de toute orientation d’esprit de l’acteur…, non seulement n’existe pas dans cette présentation, mais aussi ne pourrait prendre un sens, car le sens est fondamentalement une affaire de mise en relation de quelque chose avec quelque chose d’autre dans une certaine perspective d’action.[59]

Le réseau-mobile est donc une affaire de signification (ou structuration) de la ‘parole’ mobile dans la conjoncture actuelle. Il est la parfaite illustration de ce corps-sans-organes qui « ne cesse de défaire l’organisme, de faire passer et circuler des particules signifiantes, intensités pures, et de s’attribuer les sujets auxquels il ne laisse plus qu’un nom comme trace d’une intensité ».[60] Si le couchsurfing[61] et le covoiturage prospèrent, ce n’est sûrement pas au seul moyen des réseaux, mais aussi en profitant du changement dans notre rapport à la mobilité et au sens que lui est porté. Le podsharing, pratique locative émergente aux États-Unis sur la base de l’adhésion, propose non seulement un réseau permettant l’accès à un logement (comme par exemple les auberges de jeunesse (hostels)), mais un accès permettant l’usage du réseau entier, plaçant ainsi le mouvement au centre de l’habitat. L’oxymore mouvement fixe n’a jamais été aussi pertinent qu’au temps de la commobilité. Le réseau-mobile n’est pas au réseau ce que l’autoradio a été à la radio ou à la voiture, mais bien plus encore. En plus d’être une nouvelle technique avec des services et des usages correspondants, il nous reste à le comprendre en tant qu’expérience, en tant que pratique.

 

Conclusion

Le recul historique reste encore trop limité pour cerner la problématique relative à une nouvelle pratique grand public née en 2007 avec la mise à disposition dans le commerce des smartphones. A partir de cette année de transition, il s’agit pour la première fois de la possibilité de communiquer à distance et sans fil, autrement que pour la seule transmission de signaux oraux (fonction téléphone) et de signaux écrits (SMS). Des applications de toute nature comme les jeux en lignes ou la transmission d’images en intégrant la géolocalisation ouvrent désormais des modes insoupçonnés d’interactions que seule la science-fiction avait jusque-là imaginés et relativement bien appréhendés. L’approche choisie dans les lignes qui précèdent, par sa nature philosophique, permet de penser la mobilité à deux niveaux, celui du corps et celui du réseau.

L’objet téléphone mobile, le corps mobile est ici considéré comme un véritable corps entre corporalité, temporalité et formalité. Le corps-mobile est la matière de la commobilité. Sa contemporanéité se loge entre une posture d’altération et une posture de subsistance par rapport à des modifications illimitées de messages modifiables en continu (exemple : journal personnel de Facebook) et des lieux représentés ou foulés par les véritables pieds de l’usager. La matérialité et sa préhension ne font pas de doute, en même temps que sa médiation informationnelle. L’objet téléphone est mobile, prolongement du corps de l’usager et médiateur pour informer de la présence corporelle de l’usager, aux absents synchrones ou asynchrones de l’environnement géo-physique de ce corps téléphonique.

Le réseau mobile est aussi double par son inscription géo-physique et pas par son inscription numérique. Le réseau lui-même provoque de la géolocalisation, c’est-à-dire une ou des localisations supplémentaires des corps éclatés géographiquement. Le réseau mobile est à la fois structuré mais aussi instable car multi-réseaux et en évolution constante, non seulement par les identifiants 3G ou 4G mais aussi par l’adhésion « amicale » quasi illimitée à des réseaux sociaux numériques (RSN). L’articulation fixe et mobile entre réseau mobile et corps mobile permet la conscience multiple des corps sur des territoires. Le réseau mobile s’impose comme « mouvement des mouvements », corps à corps sur des territoires. Ces communautés de corps ainsi développées doivent être l’objet de recherches pour en appréhender le mieux possible les modalités de mise en contact.

 

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Citations bibliographiques

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[2]    Walter Benjamin, L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique (Paris : Éditions Payot & Rivages, 1935).
Cet article repose sur le développement d’un extrait de la thèse de doctorat en sciences de l’information et de la communication, Lilyana Valentinova Petrova Le parcours commobile. Des pratiques numériques en situations de mobilité : approches interdisciplinaires et visuelles de l’immersion. Université Savoie Mont-Blanc. 2017
[4]    Maurice Merleau-Ponty, L’œil et l’esprit (Paris : Gallimard, 1961), 52.
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[10]  Merleau-Ponty, Phénoménologie de la Perception, 1987, cité par Fabienne Martin-Juchat, « Anthropologie du corps communicant. État de l’art des recherches sur la communication corporelle », Médiation et information 15 (2001): 11.
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[12]  Edmond Couchot, Des Images, du temps et des machines dans les arts et la communication, [En ligne] (Paris : Éditions Jacqueline Chambon-Actes Sud, 2007).
[13]  Martin Heidegger, Être et temps (1927), trad. par Emmanuel Martineau ([Édition en ligne] : Édition numérique hors commerce, 1985), 404, http://www.oocities.org/nythamar/etretemps.pdf.
[14]  Bernard Andrieu, Philosophie du corps. Expériences, interactions et écologie corporelle, 20.
[15]  Fragment 91 (134), Héraclite, Fragments, trad. par Marcel Conche (Paris : Presses Universitaires de France, 1986), 459.
[16]  Fragment 12 (132), Héraclite, 452.
[17]  Fragment 31 (82), « [c]onversions du feu : d’abord mer, de mer, la moitié terre, et la moitié souffle brûlant. <Terre> se dissout en mer, et est mesurée selon le même rapport qu’avant de devenir terre » Héraclite, 289.
[18]  Maurice Merleau-Ponty, La structure du comportement (Paris : Presses Universitaires de France, 1967), 102.
[19]  Jean-Paul Sartre, « Les Mobiles de Calder », in Alexander Calder: Mobiles, Stabiles, Constellations (Paris : Galerie Louis Carré, 1946), 9‑19.
[20]  Sartre.
[21]  Sartre.
[22]  Sartre.
[23]  Un mème est un élément repris et décliné en masse sur Internet. « Mème ». Wikipedia, consulté le 6 septembre 2017. URL : https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A8me_Internet.
[24]  Emile Durkheim, Les règles de la méthode sociologique (1894), [Édition en ligne]. Réalisée à partir du livre d’Émile Durkheim (1894), Les règles de la méthode sociologique. Paris : Les Presses universitaires de France, 16e édition, 1967 (Chicoutimi : Les classiques des sciences sociales, 2002), 29, http://classiques.uqac.ca/classiques/Durkheim_emile/regles_methode/durkheim_regles_methode.pdf.
[25]  Bergson, Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit (1896), 20.
[26]  URL : http://www.mouvementartmobile.com/
[27]  C’est-à-dire d’une entité qui reconnaît les points de ses passages « Le nomade a un territoire, il suit des trajets coutumiers, il va d’un point à un autre, il n’ignore pas les points (point d’eau, d’habitation, d’assemblée…) […] » Gilles Deleuze et Félix Guattari, Capitalisme et Schizophrénie 2. Mille Plateaux (1972) (Paris: Les Éditions de Minuit, 1980), 471.
[28]  Bernard Andrieu, éd., Dictionnaire du corps en sciences humaines et sociales (Paris : CNRS Éditions, 2006), 341.
[29]  Denis Diderot et Jean le Rond d’Alembert, « Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, par une Société de Gens de lettres », 1772 1751, 14:167, https://encyclopedie.uchicago.edu/.
[30]  Le réseau est un entrelacs de cheminements et de possibles qui construit « une temporalité, parce qu’il construit un espace doté d’une fonction de clôture ; même si cette clôture ne prend pas la forme d’une convergence vers une marque ”fin” » Pierre Barboza et Jean-Louis Weissberg, L’image actée. Scénarisations numériques, parcours du séminaire. L’action sur l’image (Paris: L’Harmattan, 2006), 54.
[31]  ATILF CNRS, « Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales » (En ligne : CNRTL, 2012), http://www.cnrtl.fr.
[32]  Pierre Musso, Critique des réseaux (Paris: Presses Universitaires de France, 2003).
[33]  L’importance de l’abstraction théorique qu’est le rhizome émerge sous la plume de Gilles Deleuze et Félix Guattari comme titre et sujet de l’introduction de Milles Plateaux, Deleuze et Guattari, Capitalisme et Schizophrénie 2. Mille Plateaux (1972), 9‑37.
[34]  « Parcours, marche à pas, comptés, mesurés le long de lignes imaginées, la trace rêve la Terre. Le promeneur la dessine et la carte est bien le territoire, quoi qu’on en ait. Les paysages appartiennent aux cartes, mais aussi aux tableaux, à la photographie, et au monde des pierres et des plantes, au sable des sentiers qui, ravinés par la pluie, ressemblent à la plage quand la marrée se retire. Ainsi rêvons-nous de la Terre et des éléments. Rêves, songes ou pensées rendent la réalité plus réelle » Chapitre Le corps, le territoire, la carte, Anne Cauquelin, Le site et le paysage (Paris : Presses Universitaires de France, 2013), 87, 87‑104.
[35]  Bruno Latour, « On Actor-Network Theory. A Few Clarifications Plus More Than a Few Complications », Soziale Welt 47 (1996): 15.
[36]  Cauquelin, Le site et le paysage, 32‑33.
[37]  Jean-Louis Weissberg, Présences à distance. Déplacement virtuel et réseaux numériques : Pourquoi nous ne croyons plus la télévision (Paris : L’Harmattan, 1999), 2, http://hypermedia.univ-paris8.fr/Weissberg/presence/presence.htm.
[38]  De l’anglais « Future generations will never really understand that a phone booth was a place where hearts could swell or be broken ». Citation tirée du film de Schumacher, Joel. Phone Booth. Crime/thriller, 2003.
[39]  Orange se propose de réinventer les cabines téléphoniques par un projet expérimental qui consiste à construire une douzaine de cabines à Paris équipées d’écran tactile, de connexion à Internet et de nouveaux services pour l’utilisateur, tout en se désengageant de l’entretien des anciennes cabines, libérés de l’obligation du service universel par la loi Macron (« Téléphonie : les cabines raccrochent pour de bon ». Leparisien.fr, 17 octobre 2015. URL : http://www.leparisien.fr/economie/telephonie-les-cabines-raccrochent-pour-de-bon-17-10-2015-5194235.php.)
[40]  « Pourquoi Google veut remettre à la mode les cabines téléphoniques ». Rue89, 31 juillet 2016. URL : http://rue89.nouvelobs.com/2016/07/31/pourquoi-google-veut-remettre-a-mode-les-cabines-telephoniques-dimanche-matin-264810.
[41]  De l’étymologie, du latin transmutare, ‘changer de place’. Dictionnaire de définitions, Antidote, version 9 [Logiciel], Montréal, Druide informatique, 2016.
[42]  URL : https://www.youtube.com/watch?v=cxdjfOkPu-E
[43]  Pierre Musso, « Territoires Numériques », Médium hal-00479599 (2008) : 38.
[44]  Musso, 38.
[45]  Perry Barlow, John. « A Declaration of the Independence of Cyberspace ». [En ligne], Davos, 1996. https://www.eff.org/cyberspace-independence.
[46]  Jean-François Fogel et Bruno Patino, La condition numérique (Paris : Éditions Grasset & Fasquelle, 2013), 71.
[47]  Henri Bergson, La pensée et le mouvant (Paris : Flammarion, 1934), 114.
[48]  Henri Bergson, Essai sur les données immédiates de la conscience (Paris : Flammarion, 1889), 203.
[49]  Bergson, 203.
[50]  « Sur la page d’assistance de l’opérateur français Orange il est possible de lire la présentation de ce que sont les réseaux mobiles : « [v]otre téléphone mobile se connecte à un réseau mobile pour passer ou recevoir des appels et pour se connecter à internet ». Après l’image ‘séduisante’ d’un groupe de jeunes qui se photographient en mode selfie en pleine nature, le texte poursuit « [g]râce aux différentes générations de réseaux mobiles 2G, 3G, 4G ou au wifi vous pouvez depuis votre mobile, votre tablette, votre ordinateur portable ou votre Airbox établir différents types de communication […] » ; les possibles sont énumérés (communiquer, traiter des emails, naviguer sur internet, envoyer des photos, écouter de la musique, consulter des vidéos) ». Page d’assistance de l’opérateur Orange, 2016, URL : https://assistance.orange.fr/mobile-tablette/tous-les-mobiles-et-tablettes/installer-et-utiliser/se-connecter-et-parametrer-un-reseau/se-connecter-a-un-reseau-mobile-3-4g/reseaux-mobiles-2g-3g-4g-presentation_65070-65879
[51]  Daniel Bougnoux, Introduction aux sciences de la communication (Paris : La Découverte, 2001), 20.
[52]  Manuel Castells, La galaxie Internet (2001) (Paris: Fayad, 2002), 255.
[53]  Bougnoux, Introduction aux sciences de la communication, 20.
[54]  Le QR code (de l’anglais Quick Response Code) est un code visuel constitué de modules noirs disposés sur fond blanc avec une capacité d’encodage de données des centaines de fois supérieures à celle de codes-barres. (Wikipedia. « Code QR », Consulté le 12 juin 2016. URL : https://fr.wikipedia.org/wiki/Code_QR ).
[55]  Airbnb est une plate-forme Web de location et de réservation de logement de particuliers fondée en 2008. (Wikipedia. « Airbnb », Consulté le 12 Juin 2016. URL : https://fr.wikipedia.org/wiki/Airbnb ).
[56]  « […] we refer to the concept of the ”network society,” and use the expression ”the mobile network society,” to emphasize the diffusion of the networking logic in all domains of social life by means of wireless communication technology. For an understanding of the network society in general, and for discussion of network theory, we refer to previous work by researchers in this field (Castells 2000a, b, 2004; Monge and Contractor 2003). The mobile network society is simply the enhancement of the social structure conceptualized as the network society by new, wireless communication technologies » Manuel Castells et al., Mobile Communication and Society. A Global Perspective (Cambridge, Massachusetts: The MIT Press, 2007), 6.
[57]  Plusieurs penseurs mobilisent le terme de révolution numérique dont l’ouvrage de Dan Steinbock, The Mobile Revolution: The Making of Mobile Services Worldwide (London; Philadelphia: Kogan Page, 2007) ou l’entretien de Marzloff, Bruno. La révolution du smartphone et la mobilité, Rencontres Mobilis 2010, organisé par le pôle véhicule du futur, 2010. Dailymotion, 2010. http://www.dailymotion.com/video/xg8qm0_bruno-marzloff-la-revolution-du-smartphone-et-la-mobilite_news#.UYn-skAW1xF. Plus récemment, le magazine Forbes a lui aussi publié un article sur les promesses portées par le mobile, Mills, Mark P. « The Mobile Revolution Has Only Just Begun ». Forbes, 19 janvier 2015. URL : http://www.forbes.com/sites/markpmills/2015/01/19/the-mobile-revolution-has-only-just-begun/.
[58]  Cette comparaison aéronautique est à comprendre en résonance au travail de Norbert Weiner, chargé durant la seconde guerre mondiale de résoudre le problème du pointage automatique des canons antiaériens. Alex Mucchielli décrit que la position (en distance et azimut) et la vitesse des avions étant fournie par les radars, le canon doit viser l’endroit où l’avion se trouvera lorsque l’obus l’atteindra. « La position du point visé est fonction de la durée du trajet, mais cette durée du trajet est à son tour fonction de la position du point visé » (Alex Mucchielli, Étude des communications : nouvelles approches (Paris : Armand Colin, 2006). Voilà comment le feed-back (cybernétique) pose les bases du calcul qui conduit aujourd’hui au réseau-mobile et ses opérations multidirectionnelles, multi-spatiales et multi-acteur.
[59]  Alex Mucchielli, Étude des communications : Approche par la contextualisation (Paris : Armand Colin, 2005), 36‑37.
[60]  Deleuze et Guattari, Capitalisme et Schizophrénie 2. Mille Plateaux (1972), 10.
[61]  Créé en 2004, couchsurfing (littéralement surfer le canapé) est une plate-forme numérique sous forme de réseau social qui propose un service d’hébergement temporaire et gratuit, URL : https://www.couchsurfing.com/